Relire Mohammed Khaïr-Eddine : transgression scripturale et mutations de la subjectivité moderne à Béni Mellal.

 

 

 

 

La Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de l’Université Sultan Moulay Slimane de Béni Mellal a accueilli, le 13 décembre 2025, une journée d’hommage consacrée à la redécouverte du parcours créatif de l’écrivain marocain disparu Mohammed Khaïr-Eddine, figure majeure de la littérature marocaine d’expression française. Cette rencontre s’est tenue sous le thème :« Mohammed Khaïr-Eddine : écriture de soi, espace et imaginaire rebelle ».

 

Cet événement scientifique résulte d’un partenariat scientifique entre le laboratoire LRALLARC et l’Association de recherche scientifique Eurêka. Il a connu une participation remarquable d’enseignants-chercheurs marocains et étrangers, ainsi que d’étudiants en master et en doctorat issus de différents horizons linguistiques et disciplinaires, tous intéressés par les champs de la narration, de la poésie et des études culturelles.

 

Une allocution inaugurale fondatrice de nouveaux enjeux critiques

La rencontre s’est ouverte par une allocution introductive du professeur Mounir Oussikoum, qui a souligné la nécessité de réinscrire les textes de Khaïr-Eddine dans le débat critique contemporain. Il a mis en lumière l’audace stylistique et la vision prospective de l’écrivain face aux défis existentiels de l’homme dans un monde en mutation. Des textes qui ont fait de leur auteur un modèle de révolte littéraire et de quête permanente d’une écriture singulière, affranchie des cadres normatifs.

 

Une séance scientifique explorant les carnets de l’écriture khaïr-eddinienne

La chercheuse française Bernadette Rey Mimoso-Ruiz, de l’Institut catholique de Toulouse, a présenté une communication intitulée : « Les Derniers Journaux (2001) de Mohammed Khaïr-Eddine ». Son intervention a porté sur l’analyse du caractère confessionnel audacieux des textes de la dernière période de l’écrivain, en mettant l’accent sur les représentations du corps et de la maladie, ainsi que sur l’acte d’écrire en tant que pratique existentielle visant une forme de réconciliation ultime avec soi-même.

Elle a également accordé une attention particulière à la dimension linguistique, en interrogeant le choix de la langue française comme médium d’écriture. Celle-ci est envisagée comme un espace de tension et de négociation entre le sujet et la langue, un lieu expressif où se croisent l’expérience intime et les enjeux identitaires et de la différence. La posture de la chercheuse, en tant que spécialiste française, a permis d’approfondir l’analyse critique de la spécificité de l’écriture khaïr-eddinienne dans son contexte linguistique et culturel.

 

Le chercheur Mohammed Koundi est ensuite intervenu avec une communication intitulée : « La quête de soi entre chaos textuel et apaisement de l’expression : le voyage de Khaïr-Eddine vers la liberté », dans laquelle il a déconstruit les structures de l’écriture khaïr-eddinienne comme un parcours à plusieurs niveaux, oscillant entre déferlement linguistique et tensions sémantiques, et un besoin de calme perceptible dans les dernières années de l’auteur.

 

Pour sa part, le chercheur Abdelilah El Hilali a présenté une communication intitulée :

« Le voyage et la sensibilité lyrique dans l’œuvre de Khaïr-Eddine », montrant comment l’écriture de l’auteur reconfigure la géographie du Souss à travers une langue vibrante, articulant mouvement physique et mouvement imaginaire.

 

La séance a été clôturée par l’intervention du chercheur Hicham Samadi, intitulée :

« La géopoétique du Souss : terre, mythe et soulèvement dans les écrits de Khaïr-Eddine », soulignant que l’écrivain a su réinventer une nouvelle relation entre la langue et l’espace, en mobilisant le mythe et le territoire comme moteurs de la subjectivité individuelle et collective.

 

Un débat scientifique réinterrogeant l’héritage littéraire de Khaïr-Eddine

La séance a donné lieu à un débat approfondi autour de la valeur du projet littéraire et créatif de l’écrivain, et de la nécessité pour l’université marocaine de poursuivre le travail critique sur son œuvre, notamment à travers la réédition de ses écrits et leur intégration dans les programmes académiques, en tant que modèle d’une écriture rebelle incarnant les questionnements identitaires et les transformations du sujet.

 

Une clôture consacrant Khaïr-Eddine comme une voix littéraire intemporelle

La rencontre s’est achevée par un appel à relire l’œuvre de Mohammed Khaïr-Eddine à la lumière de nouveaux cadres théoriques, croisant études culturelles, approches géopoétiques et analyses de l’écriture de soi, afin de mettre en valeur la richesse de son expérience et sa capacité durable d’inspiration.

 

À travers l’organisation de cette journée d’hommage, la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Béni Mellal, le laboratoire LRALLARC et l’Association Eurêka pour la recherche et les études en langue, littérature et identité ont contribué à raviver la mémoire de l’une des voix les plus marquantes de la littérature marocaine, Mohammed Khaïr-Eddine, un écrivain demeuré fidèle à une philosophie de l’écriture fondée sur la liberté, la recréation permanente de soi et la redécouverte du monde.

 

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